L’aménagement du territoire relève de la compétence des cantons et des communes. La Confédération se limite à édicter des principes selon l’idée du fédéralisme qui a prévalu jusqu’à aujourd’hui. Or, il semblerait que le système d’organisation centralisateur à «l’européenne» ait atteint les autorités fédérales lors de la révision de la LAT puisque nous assistons à un interventionnisme massif de la Confédération, à un flot de nouvelles prescriptions uniformes pour tous les cantons et à des atteintes sévères à la propriété privée.

Durant ces dix dernières années, les grandes agglomérations du plateau suisse ont connu une augmentation frénétique de l’urbanisation, laquelle s’est répandue du lac Léman au lac de Constance de manière inégalée par rapport au reste du territoire helvétique. Le plateau suisse, pourvu d’excellentes terres agricoles, se trouve aujourd’hui pris entre deux feux. Le manque de terrains à bâtir d’une part et le risque (ou la tentation) de sacrifier ses réserves en terres agricoles d’autre part.

Parallèlement, les régions périphériques comme le Valais et le Jura ont des réserves de terrains en suffisance bien qu’elles ne manquent ni de motivation et ni d’ambition pour se développer. Des projets d’agglomérations sont mis en place, de nouvelles voies de communication sont en construction, des investissements dans le tourisme sont engagés, bref, tout est mis en œuvre afin que nous puissions nous désenclaver et nous connecter au plateau suisse, non pas pour le recopier mais pour répartir de manière équitable sur l’ensemble du territoire national cette urbanisation croissante.

Alors certes, notre rapport au terrain n’est pas le même dans nos régions périphériques que dans les grands centres urbains. Le canton du Jura compte dans ses rangs des familles qui, dans leur très grande majorité, y vivent depuis des générations et qui ont pour la plupart d’entre elles des parcelles de terrain qu’elles ont héritées et non pas sur lesquelles elles ont spéculé. La révision de la loi sur l’aménagement du territoire entend limiter les zones à bâtir pour une durée de 15 ans. Il n’y a, dans le cas précité rien de nouveau par rapport au système que nous connaissons et appliquons à l’heure actuelle. Mais au regard de la révision, il y a un cas de figure de taille à battre en brèche concernant le cas suivant : les terrains qui ne seraient pas construits dans le délai imparti de 15 ans devraient être déclassés, faisant perdre ainsi leurs terrains à bâtir à un bon nombre de personnes. Pour les propriétaires de terrains déclassés, la perte pourrait s’avérer très importante lors du passage de leur terrain de la zone à bâtir à la zone agricole, notamment pour ceux qui conservent ce terrain comme nantissement d’hypothèques ou comme placement pour les générations futures. Une indemnisation, fût-elle calculée au mieux pour le lésé, constituera-t-elle tout de même une solution acceptable par rapport à l’affectation et l’utilisation initialement prévues du terrain ? Le fait d’indemniser une famille qui a gardé du terrain pour sa descendance privera cette même descendance du terrain qui lui était réservé. Bien qu’ayant été indemnisée, la descendance n’a plus de terrain à bâtir, tout simplement ! Alors comment définir cette manière de procéder autrement qu’en termes d’expropriation ? Comment pouvons-nous accepter pareille ingérence de l’Etat en matière de droit à la propriété ?

Les restrictions actuelles permettent déjà une bonne gestion d’ensemble de l’aménagement du territoire. Le fédéralisme tend de plus en plus à s’édulcorer au profit d’une étatisation centralisée à l’européenne ! L’USAM et l’UDC, dans leurs arguments, entendent bien défendre les libertés et les droits fondamentaux de nous tous, tout en s’assurant que les considérations écologiques aient le même poids dans la balance que les besoins de développement économique de notre pays et surtout de notre région périphérique jurassienne. En ce qui concerne notre section communale, la divergence des avis et le respect démocratique de l'exercice politique qui nous anime nous appelle, après discussion, à laisser la liberté de vote sur ce sujet.

Pour ma part, c’est avec conviction et détermination que je vous encourage à rejeter par un «NON» dans l’urne le 3 mars prochain, cette révision de la Loi sur l’aménagement du territoire.

Cédric Anker, secrétaire UDC Courroux-Courcelon.